Cette nouvelle exposition, consacrée aux créations du styliste belge Martin Margiela pour la maison Hermès de 1997 à 2003, est à découvrir au musée des Arts décoratifs du 23 mars au 2 septembre 2018. Morceaux choisis pour vous donner simplement envie.
Un mariage contre-nature et pourtant…
Martin Margiela, diplômé de l’Académie royale des beaux-arts d’Anvers, est un créateur sans visage, un styliste hors-norme, à contre-courant de son époque avec son choix de tissus monochromes, ses coupes construites-déconstruites, l’utilisation de matières recyclées, son attachement à la fluidité du vêtement, ses volumes oversize. Dès la création de la Maison Martin Margiela en 1988, il fait le choix de l’anonymat, refusant de faire apparaître son nom sur ses étiquettes, simplement cousue de 4 points blancs, signe de reconnaissance de l’homme.
Il est assez étonnant, dès lors, qu’en octobre 1992, Jean-Louis Dumas, président et directeur artistique d’Hermès, fasse appel à cet iconoclaste, à l’avant-garde des tendances mode du moment, pour lui confier la réalisation des collections de prêt-à-porter de la maison. Et pourtant, pendant dix ans et douze collections, Martin Margiela va instiller et « asseoir » une vision cohérente, mixant audace et classicisme, pour donner naissance à une ligne cohérente, une image renouvelée et juste du luxe contemporain.
La mise en scène joue la carte du dialogue entre Hermès et Maison Martin Margiela, un dialogue qui s’exprime en orange (Hermès) et blanc pour la Maison Martin Margiela, un diptyque qui met en avant la duplicité du créateur, son talent, et sa vision du vêtement pour le maître sellier parisien.
Martin Margiela redéfinit la femme Hermès
Elle est classique et se magnifie dans l’épure de la coupe ; ses maîtres mots sont désormais confort, intemporalité, authenticité. Fini les motifs colorés, place au monochrome, à une palette sobre, aux formes amples, vêtements transformables, superposables, élégants et confortables.
Fonction, innovation et tradition
Au fil de la visite et des pièces découvertes (plus d’une centaine), on appréhende une lecture différente du vêtement, de pièces novatrices, du choix des matières, des formes : on saisit le désir, l’ambition de donner du sens à la création, une unité et le respect profond des valeurs d’une maison de luxe comme Hermès. On touche le talent, le génie créatif de l’homme, Martin Margiela, qui passe d’un univers à un autre, d’une maison à une autre, avec une aisance insolente.
Il crée des vêtements transformables et superposables, offrant à la femme Hermès plusieurs combinaisons possibles, n’hésite pas à faire réapparaître certains modèles à succès sur plusieurs saisons. Il modèle et module, invente une continuité, les collections deviennent interchangeables, complémentaires, il crée des intemporels, et bien avant tout le monde le concept de slow fashion, une analyse finalement très juste du produit de luxe, réfractaire à la nécessité constante de nouveauté.
Nous n’en dirons pas plus, le reste est à découvrir à l’exposition Margiela, les années Hermès au Musée des Arts décoratifs à Paris (107 Rue de Rivoli, 75001).
Texte et photos Alexa Pougeux